Héroïne, Etats Unis, CBGB, Senders.


En tant que français, nous ne pouvons nous vanter d'avoir dans notre patrimoine un nombre exorbitant de personnages un tant soit peu Rock'n'Roll dont nous pouvons être fiers. On peut, en fait, les compter sur les doigts d'une main. En prenant cette main pour exemple, on pourrait dire que Philippe Marcadé en représente l'auriculaire. Exilé aux Etats Unis depuis 1972, le BaguetteBéret a cotoyé tout le monde. Du Ramone au Cramp, de Debbie Harry à Bob Marley, on ne peut nier l'évidence : Philippe Marcadé a un don pour être au bon endroit au bon moment.
A la vue de son livre, Au Bout De L'Avenue D, on ne peut qu'ouvrir grand yeux et bouche. Puis on voit le prix (vingt quatre euro, tout de même), qui, étrangement, freine notre élan. L'hésitation reprend le dessus, et l'on tourne les talons, tout en restant perplexe. Ce qu'il ne fallait pas faire. Voilà pourquoi :

Soyons honnêtes, on ne sent pas un réel talent d'auteur chez le Marcadé. Le language est très parlé, les mots en majuscules et autres interjections semblent avoir été vendues au mètre, rendant le récit un peu adolescent. On apprend cependant de nombreuses choses inutiles (donc indispensables) sur la scène punk New Yorkaise : le "qui couche avec qui ?" se mêle aisément au "tel groupe joue-t-il plus au Max's ou au CBGB ?".
On peut effectivement critiquer la forme, mais qu'en est il du fond, potins mis à part ? Là est le problème. Car ce livre est bien une biographie, mais finalement, la vie en tant que telle de Philippe Marcadé nous importe elle ?
Malgré tout, on se laisse emporter dans ce tourbillon de sexe, drogues et Rock'n'Roll, ou, sans surprise, ce qui nous reste est ce délicieux sentiment de
décadence. A tel point qu'à peine commencé, on ne peut décoller les yeux du livre. Au diable les faiblesses de styles, et autres ragots de bas étage, cet ouvrage est addictif. On s'imagine sans difficulté à ses côtés, traversant le New York underground de cette fin des années 70 devenue mythique. Le manque de came est presque physique lorsque l'on imagine le dandy punk accelérer le pas dans les rues sombres menant aux inquiétants immeubles abritant les dealers.
Seulement, une fois que l'on referme le livre, subsiste cet étrange sentiment. Il ne reste plus rien, et si l'on vous demande de parler du livre, vous en serez très probablement incapable, étant donné qu'il ne contient que du vide. Du divertissement électrique, dont on aurait aisément pu se passer. Quoique : ces quelques heures passées dans les lignes vaguement poudrées du récit de Philippe Marcadé représentent du rêve sur papier. On n'était pas là, et c'est trop tard de toute façon, mais rien n'empêche de se constituer une mémoire factice grâce à des ouvrages comme celui ci ; il est donc grand temps pour vous d'aller vous risquer Au Delà De L'Avenue D.